mercredi 29 mars 2017

Après les attentats, écrire l'horreur pour survivre

Comment survivre après ce qui s’est passé lors d’attentats, lorsque on a tout perdu, époux, enfants, amis, êtres chers, ou tout simplement comment vivre après le choc, la sidération, l’incompréhension, le mal-être.

Dans Vous n'aurez pas ma haine, d’Antoine Leiris, tout est raconté sous forme d’un journal, à partir du 13 Novembre 2015. 
Il est à son domicile et garde son fils de 17 mois, Melvil, pendant que son épouse Hélène est partie assister au concert de « Eagles of Death Metal », à la salle du Bataclan. 
Une certaine quiétude règne dans l’appartement, Melvil est couché, et Antoine lit tranquillement en attendant le retour de son épouse. Un simple coup de fil auquel il ne répond pas, un message laissé sur le répondeur va faire basculer la vie d’Antoine et de son fils dans l’horreur. 
Antoine Leiris a passé la nuit du 13 novembre à chercher Luna-Hélène. Il n’apprendra que le 14 novembre à 20 heures qu’elle n’est plus là. "Quelques hommes en colère ont fait entendre leur verdict à coups d’armes automatiques. Pour nous, ce sera la perpétuité", écrit-il.
Le 16 novembre, Antoine Leiris va aller reconnaître le corps de sa femme, à l’institut médico-légal, et il écrit : "Elle est aussi belle qu’elle l’a toujours été… Je pleure, lui parle, j’aimerais rester une heure encore, une journée au moins, une vie peut-être. Mais il faut la quitter. La lune doit se coucher. Le soleil, ce 16 novembre, se lève sur notre nouvelle vie…il était une fois. L’histoire d’un père et d’un fils qui s’élèvent seuls, sans l’aide de l’astre auquel ils ont prêté allégeance".
Le 24 Novembre,  jour des obsèques de son épouse, Antoine Leiris n’emmène pas Melvil, et écrit une lettre au nom de son fils : une lettre pour sa maman, qu’il ne reverra pas.
Quelques jours plus tard, il retourne au cimetière avec son fils, et Antoine Leiris écrit : "Toute ma vie est sous mes pieds".
Malgré le chagrin, malgré la douleur, malgré l’absence, "Nous serons toujours trois", assure-t-il. 

Dès le 16 Novembre, Antoine Leiris publie un post "Vous n’aurez pas ma haine" sur sa page Facebook. Il s’adresse aux terroristes, sans jamais les nommer. Il débute ainsi "Vendredi soir, vous avez volé la vie d’un être d’exception, l’amour de ma vie, la mère de mon fils mais vous n’aurez pas ma haine".  
Ce message fait  le tour du monde, la Une de plusieurs journaux, (Le Monde et Der Spiegel) et est partagé des millions de fois sur les réseaux sociaux. 
Cinq mois après les attentats, Antoine Leiris publie Vous n’aurez pas ma haine, un journal poignant (du 13 novembre au 25 novembre) récit des douze jours qui ont suivi la mort de son épouse.
Ce court récit montre comment il a dû gérer l’impensable,  l’horreur, le chaos dans sa vie et celle de son fils, et en même temps le quotidien de Melvil, la perte de son amour et de la mère de son enfant. 
Ces quelques pages sont poignantes, pleines de tendresse et d’émotions.
Sans elle, il décide de continuer à vivre.
Pour elle, il décide encore de poursuivre ce qu’elle avait commencé auprès de leur fils, d’installer une certaine normalité de vie, la lecture de livres pour le petit, de la même manière que le faisait son épouse, en sautant les pages trop dures ou en en changeant les fins trop cruelles, établir une playlist de chansons porte-bonheur, le conduire à la crèche, bref, protéger son enfant, et surtout vivre.

Une très belle leçon de vie à chaque ligne de son récit, et un désir de ne pas s’écrouler, voilà ce qu’il ressort du texte d’Antoine Leiris. Continuer.
Cette écriture de ces moments bien précis dans la vie d’Antoine Leiris, peut servir à tous d’exemple.

Coquillette